A l’unité de transformation de lait Café Rio, à Bobo Dioulasso, chacun est à son poste de travail. Certains sont au lavage d’emballage, d’autres au conditionnement et à l’étiquetage. Avec les mesures anti Covid-19 c’était impératif de réorganiser les activités et les heures de travail pour continuer à fonctionner et développer d’autres initiatives pour écouler les produits. « Maintenant on travaille de 6 heures 30 à 17 heures. Si les commerciaux avaient l’habitude d’aller sur le terrain à 8 heures, ils sortent à 7 heures. Une solution mise en place pendant le couvre-feu pour maximiser le nombre de clients» déclare Azara Toé, la promotrice de la laiterie Café Rio « Nous avons beaucoup de clients hors de Bobo et à l'extérieur du pays. On était obligé de traiter avec les transporteurs : les camions prennent beaucoup plus de temps avant d’arriver à destination, du coup pour maintenir le produit frais il a fallu diminuer la quantité habituelle et la remplacer par la glace ».
Le lait fait partir des quatre filières les plus impactées par la crise sanitaire du Coronavirus selon l'étude réalisée par le Programme d’Appui à la Promotion de l’Entrepreneuriat Agricole (PAPEA), un projet financé par la Coopération suisse et mise en œuvre par Helvetas et SNV, qui dans la région des Hauts-Bassins accompagne 8 filières.
« Au début de la crise quand on disait que le Coronavirus pouvait venir des animaux, la consommation du lait a beaucoup chuté » raconte Yacouba Korbeogo, président de la coopérative des producteurs de lait Ben Kadi « On était obligé de vendre le lait de porte-à-porte, de mettre les gens en congé, de diminuer le nombre du personnel ».
Durant la crise on a observé une flambée des prix des biens et services et une chute considérable du chiffre d’affaires des acteurs. « Le coronavirus est arrivé au mauvais moment. Car, c’est durant la saison chaude et le carême que nous faisons le maximum de chiffre d’affaires», comme le dit Azara Toé « On produisait 600 à 700 litres de lait 4 à 5 fois par semaine, maintenant nous sommes entre 400 et 500 litres. Avant la crise notre chiffre d’affaires était entre 7,5 et 8 millions de francs CFA, dans les premiers mois de la quarantaine il avait chuté jusqu’à 5 millions ».
Azara Toé, promotrice de la laiterie Café Rio
Aussi avec l’augmentation du prix des aliments de bétail certains acteurs ont subi des pertes « le sac du son de maïs qu’on payait à 3000F maintenant on le paie à 6000F tout a augmenté sauf le prix du lait qui a baissé. Mais les vaches ne pouvaient pas rester sans manger» poursuit Yacouba Korbeogo «. Les vaches métissées coûtent en moyenne 400 000F à 1 million de francs CFA. Elles ne supportent ni la faim ni les maladies. Parmi nous il y a eu des gens qui ont perdu leurs animaux ».
Cependant, les crises sont parfois des opportunités : « Ça m’a permis d’élargir mon marché car certains transformateurs n’arrivaient plus à ravitailler leurs clients. D’autres revendeurs m’ont contacté pour que je les livre du yaourt » nous confie Azara Toé « J’avais fait un stock de ferment pour un trimestre et du coup certains transformateurs de lait à Bobo étaient obligés de prendre Café Rio pour ensemencer leur lait ».
Pour soutenir systématiquement les acteurs de la filière lait une cellule de veille a été mise en place pour suivre le prix des intrants, l’évolution des stocks, partager les informations avec les autres acteurs et mettre en place une feuille de route donc le PAPEA supportera les frais. Les unités et centres de collecte de lait ont été dotés de kits d’hygiène et de thermo-flashes. Les investissements prévus par le PAPEA pour venir en aide des acteurs de la filière lait s’élèvent à plus d'un milion de FCFA.