« Des hommes armés ont encerclé par surprise les populations au marché du village, ils ont séparé les hommes des femmes. Ils tuèrent les hommes et ordonnèrent aux femmes de quitter le village. Mon mari a été exécuté. C’était dans l’après-midi à 15h » déclare Bibata Kindo, 56 ans, déplacée interne et mère de huit enfants. Ressortissante de Silgadji, une commune située dans la province du Soum, région du Sahel, Bibata était dans un désarroi total. « Après le départ des terroristes, les femmes et les enfants se dispersèrent. Mes enfants avaient disparu, lorsque je les ai retrouvés, nous avons fui. Nous nous sommes réfugiés d’abord en brousse et par la suite nous avons pu emprunter un taxi-moto pour nous rendre à Sitogo, un village situé à 9km de Séguénéga, dans la province du Yatenga, région du Nord » déclare-t-elle. L’attaque de Silgadji a eu lieu le 25 janvier 2020. Les opérations de ratissage des forces de défense et de sécurité ont permis de constater la mort d’au moins 39 personnes. La province du Soum dans la région du Sahel et la région voisine, le Centre-nord, ont été particulièrement touchées par la menace terroriste.
A Silgadji Bibata ramassait du bois qu’elle vendait pour gagner de l’argent. Elle était membre d’une coopérative de femme où elles produisaient et commercialisaient de l’atiéké. Elle vendait également du poisson, car elle avait un congélateur. A cette période, elle était autonome financièrement. « Cependant, nous avons été vraiment surpris par l’attaque et nous n’avons pas pu transporter nos matériels de travail. La machine que j’utilisais pour presser l’atiéké, les utensiles de cuisine, le congélateur sont restés à Silgadji » souligne-t-elle.
A son arrivée à Sitigo avec les enfants elle a été accueillie par un oncle de son mari. « Il nous a soutenus moralement et financièrement. Je n’avais plus d’économie pour commencer une activité. Ainsi, je restais chaque jour à la maison avec les enfants » précise-t-elle.
Depuis Février 2020, Helvetas est intervenu dans les communes de Séguénégua, Kossouka et Rambo pour assister les déplacées interne à travers le projet WASHPRO financé par la Chaîne du Bonheur et Medicor Foundation.
Bibata Kindo, veuve de 56 ans, déplacée interne
Le projet a accompagné les déplacées avec le cash transfert dont le but était de les permettre de se doter de kits d’hygiène et démarré une petite activité. « J’ai bénéficier d’une somme de 75 000 FCFA avec lequel, j’ai pu m’acheter un vélo qui me permet d’aller chercher du bois en brousse et revendre au marché. Avant, lorsque je marchais y aller, je prenais énormément de temps, maintenant pour un trajet de 3 heures, je fais 1 heure » nous confia Bibata. « Aussi, j’ai pu commencer le commerce de pagne. J’ai acheté des kits d’hygiène : seaux, bidons, balais, lave-mains, savon afin de nous protéger contre les maladies, j’arrive à assurer la nourriture des enfants et à subvenir à d’autres besoins de la famille » ajoute-t-elle.
Helvetas, dans sa politique de la promotion des bonnes pratiques d’hygiène et d’assainissement a mis en place les comités villageois d’assainissement (CVA) dans chaque village :« Lorsque j’ai reçu, l’information, je me suis vivement intéressé et j’ai intégré le CVA de Sitigo » affirme Bibata avec fierté. Les membres de CVA ont été aussi formé dans la fabrication du savon liquide et du savon boule. Cela a permis de rendre accessible le savon en quantité et en qualité aux communautés.
« J’ai bénéficié des deux formations. Nous produisons du savon liquide et du savon boule chaque trois jours que nous vendons aux membres de notre communauté à des prix abordables. Les bénéfices sont sauvegardés dans la caisse du comité. Cela nous permet de produire permanemment, de rendre disponible le savon qui est souvent difficile d’accès à la population et de contribuer à la santé de la communauté » déclare Bibata. «Ma famille a bénéficié d’une latrine qui nous a beaucoup soulagé. Avant, on partait en brousse pour déféquer »
Le projet WASHPRO a travaillé dans le domaine de l’eau, l’hygiène et l’assainissement avec des activités qui visait à apporter une aide immédiate aux populations affectées par la crise humanitaire, mais aussi à création des actions pérennes pour rendre les populations autonomes. Ainsi, la communauté locale a été fortement impliquée dans la mise en œuvre des activités.
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