Exactement deux ans après la votation sur l’initiative pour des multinationales responsables, les initiant·e·s ont déposé une pétition munie d’un nombre impressionnant de signatures auprès de la Chancellerie fédérale. Alors que l’UE s’apprête à introduire une loi efficace sur la responsabilité des multinationales, le Conseil fédéral doit tenir sa promesse formulée lors de la campagne de votation de 2020.
Communiqué de presse de la coalition pour des multinationales responsables.
« Nous sommes nous-mêmes impressionnés par le nombre de signatures récoltées en si peu de temps », commente Dick Marty, ancien conseiller aux États (PLR/TI) et membre du comité de la Coalition pour des multinationales responsables. « L’écho énorme rencontré par la pétition montre clairement que la population ne souhaite pas que la Suisse devienne bientôt le seul pays d’Europe sans responsabilité des multinationales. » Des centaines de bénévoles se sont engagés au cours des trois derniers mois, soutenus dans leurs efforts par une trentaine de personnalités, premières signataires de la pétition.
Munie de 217 509 signatures, la pétition a été déposée aujourd’hui à la Chancellerie fédérale et demande au Conseil fédéral et au Parlement d’introduire une loi efficace sur la responsabilité des multinationales, comme cela est prévu au niveau de l’UE. Au début de cette année, la Commission européenne a en effet présenté une nouvelle directive, qui prévoit un devoir de diligence large associé à des dispositions en matière de responsabilité civile et à la mise en place d’autorités de surveillance. Ce projet, qui devrait être adopté d’ici fin 2023, va donc plus loin que l’initiative pour des multinationales responsables.
« À ce jour, si une multinationale comme Glencore viole les droits humains ou détruit l’environnement, elle n ’est toujours pas tenue de répondre de ses actes », constate Chantal Peyer, conseillère politique à l’EPER et membre du comité de la coalition. « Lors de la campagne de votation, le Conseil fédéral a promis d’agir de façon “coordonnée au niveau international”. Notre pétition rappelle qu’il est grand temps que la Suisse se dote elle aussi d’une loi efficace sur la responsabilité des multinationales. Pour s’assurer qu’elle parvienne à mettre en vigueur une réglementation au même moment que l’UE, la Suisse doit démarrer les travaux dès aujourd’hui. »
La Suisse à la traîne
En plus du projet de directive sur la responsabilité des multinationales, l’UE travaille actuellement à de nombreux autres projets de réglementation. Sont notamment prévus : un règlement visant à interdire les produits issus du travail forcé sur le marché de l’UE ainsi qu’un dispositif qui devrait interdire l’importation de certains produits comme la viande de bœuf ou le soja, si ceux-ci provoquent la déforestation. À ce sujet, les propos de Martin Landolt, conseiller national du Centre, sont très clairs : « En comparaison internationale, la Suisse sera bientôt totalement à la traîne en matière de responsabilité des multinationales. De mon point de vue, le Conseil fédéral a désormais la responsabilité de s’aligner sur les autres pays dans ce domaine. »
De nouveaux scandales régulièrement rendus publics
Depuis la votation sur l’initiative pour des multinationales responsables, de nouveaux cas de violation des droits humains et de pollution de l’environnement par des multinationales établies en Suisse sont malheureusement régulièrement rendus publics. Fin septembre, les journaux de Tamedia ont par exemple révélé que l’UBS finançait des multinationales agroalimentaires brésiliennes impliquées dans la déforestation illégale. Le leader mondial du transport de conteneurs MSC fait démanteler ses navires dans des conditions catastrophiques sur des plages indiennes. Par ailleurs, de nouveaux documents révèlent par quels moyens peu scrupuleux Syngenta a dissimulé la dangerosité de son pesticide : le paraquat. Rahel Ruch, directrice de la Coalition pour des multinationales responsables, commente : « Les multinationales doivent être tenues de répondre des dommages qu’elles causent. C’est la seule façon d’éviter de tels problèmes à l’avenir. »